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Un Chinois à la FAO et le sens des priorités

Je n’arrive pas à m’en remettre, d’autant que par ailleurs quasiment tout le monde s’en fout : c’est Qu Dongyu, le vice-ministre de l’agriculture chinois, qui a été nommé à la tête de la FAO, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture.

La Chine est un pays dont l’agriculture et l’élevage ne cessent de créer d’innommables problèmes sanitaires. A force de tuer leurs gosses avec leur poudre de lait dégueulasse, ils ont fini par préférer importer de la poudre de lait française. On ne compte plus les problèmes sanitaires graves dans leurs élevages de cochons. Leurs élevages de vaches qui font de 10 000 à 100 000 têtes (non, je ne me trompe pas dans le nombre de zéros) ont irrémédiablement pollué des surfaces de culture et des nappes phréatiques. Toutes les transmissions de grippe aviaire à l’humain de 2014 à aujourd’hui se sont produites en Chine – on en compte des dizaines sur le site de l’OMS. Et pour arranger les choses, le nouvel arrivant à la FAO promet de travailler main dans la main avec Bayer. Et tout ça dans un contexte où la Chine peinant à produire assez pour elle-même achète plus ou moins proprement des terres agricoles dans le monde entier, y compris chez nous.
Dans un tel contexte, un vice-ministre de l’agriculture chinois à la tête de la FAO devrait au minimum faire flipper tout le monde. Mais non. Un article ici et là, et c’est tout. Pire, en France, où l’agriculture est une des moins crades du monde n’en déplaise à nombre de mes compatriotes, on focalise sur une vingtaine de vaches à hublot plutôt que de regarder en face ce qu’on va se prendre dans la gueule avec cette nomination.

Pour rappel, parmi les rôles de la FAO, il y a :

– harmoniser les normes dans les domaines de la nutrition, l’agriculture, les forêts et la pêche.
– conseiller les gouvernements.
– développer le Codex alimentarius, système de normalisation internationale en matière alimentaire.

Presque rien : juste un poids énorme sur ce que nous mangerons demain.


Vie et destin – Vassili Grossman

Par où commencer pour vous résumer les 1200 pages très denses de ce roman qui en est à peine un ? Eh bien commençons par là : si c’est un roman, on est très vite happé par son réalisme cru, et on en comprend aisément la cause en découvrant la biographie de Vassili Grossman. Issu d’une famille bourgeoise juive, il était à la base ingénieur chimiste. Il a travaillé dans une mine, ignore comment il a pu être épargné par les premières purges soviétiques contrairement à d’autres membres de sa famille, il a dû se battre pour éviter le goulag à son épouse et quand la guerre a éclaté, il est devenu correspondant de guerre à Stalingrad.

Vie et destin relate la vie d’une famille Russe juive à travers la guerre, du siège de Stalingrad aux camps de concentration nazis, de l’Académie des Sciences soviétiques aux camps d’internement russes, de Moscou aux petites villes de province. Et on comprend tout de suite mieux le réalisme du récit. Il nous décrit le quotidien des habitants de Stalingrad assiégée, la famine, la peur instillée par le régime de Staline dans tout le pays et le poids d’une administration centrale toute puissante. Loin de se contenter de descriptions, les chapitres plus ou moins romanesques sont entrecoupés de réflexions profondes sur des sujets variés et, pour certains, intemporels. Jusqu’à la lecture de Grossman, je n’avais jamais vraiment compris pourquoi faire la différence entre racisme et antisémitisme. En quelques pages, il m’a fait comprendre l’évidence, que je vous laisserai découvrir car personne ne l’a jamais aussi bien expliqué que lui. En outre, ses propos sur la surveillance de masse du régime de Staline sont terriblement d’actualité. Ses réflexions sur le collectivisme devraient calmer plus d’un utopiste de notre époque. Et mettant en parallèle les réalités du nazisme et du communisme, il creuse la question des idéologies qui promettent des lendemains qui chantent, tranchant sans naïveté : elles ne peuvent mener qu’à des purges et des massacres.

Vassili Grossman a terminé la rédaction de Vie et destin en 1962. Le KGB lui est tombé dessus, son manuscrit a été saisi ainsi que les rouleaux encreurs de sa machine à écrire. Cette œuvre aurait pu disparaître à jamais. Heureusement pour nous, car c’est un document précieux, Andreï Sakharov en a fait sortir une copie du pays. Il sera publié à l’ouest au début des années 80, et en Russie seulement après la chute du mur.

Vie et destin m’apparaît comme un ouvrage qu’on doit lire. Il est indispensable, riche, dense. Mais je ne vais pas vous mentir : ça n’est pas une mince affaire que de s’y attaquer. Outre sa longueur, le nombre des personnages ne simplifie pas la lecture. Et ça n’est rien encore en comparaison du fond. Mais c’est ainsi : il faut souvent se donner un peu de peine pour accéder au meilleur. Entre Histoire, histoire des idées, philosophie, politique et sociologie, Vie et destin est désormais rangé dans ma bibliothèque sur l’étagère des indispensables chefs d’œuvre, de ces livres qui appartiennent ou devraient appartenir au patrimoine mondial de l’humanité.

Une petite note, pour conclure, au sujet du Livre de poche qui publie cet ouvrage : quand on est responsable de la publication d’une telle œuvre, il est absolument honteux d’y laisser traîner autant de fautes. C’est inqualifiable de maltraiter ainsi un chef d’œuvre. Je ne les ai pas comptées, mais j’ai maudit au moins vingt fois cet éditeur pour son travail lamentable. Si vous l’achetez, sachez qu’il est aussi publié par Pocket : peut-être, mais je n’ai pas vérifié, ont-ils fait un travail plus respectueux à ce niveau que le Livre de poche.


Le Prince, la lune et les fornicateurs de Florent Kieffer

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On a plus ou moins de plaisir à découvrir et à faire découvrir un livre. Concernant ce petit ouvrage, on a très envie de le faire lire à tout le monde. Non qu’il s’agisse d’un chef d’œuvre : je parlerai plutôt de friandise.

Le Prince, la lune et les fornicateurs n’est pas vraiment un roman, mais plutôt un conte moderne. Il était une fois, dans un temps lointain, un royaume où tout le temps libre est utilisé pour se laisser aller à la fornication, au grand désespoir de l’Intendant qui décide de trouver tous les moyens possibles de lutter contre cette activité improductive en combattant l’existence même de l’érection. Avec pareil sujet, il eut été aisé de sombrer dans la vulgarité, dans l’érotisme à deux sous ou dans les lieux communs insupportables : Florent Kieffer évite pourtant tous ces écueils pour nous offrir au contraire un récit plein de finesse et d’humour.

Évidemment, ça n’est pas un conte pour enfants : destinés à celles et ceux qui ont au moins une vague idée de ce qu’est le désir sexuel, l’histoire n’aurait aucun intérêt pour des petits. Mais de par sa forme, et malgré le sujet traité, il s’adresse tout de même à la part d’enfant qui sommeille dans chaque adulte. C’est frais et réjouissant. C’est très facile à lire, si bien qu’il est accessible même aux lecteurs débutants, sans ennuyer les lecteurs confirmés : une vraie gageure pour un auteur !

Comme beaucoup de contes, il délivre une sorte de morale, mais une morale qui explose les cadres rigides que l’humanité n’a eu de cesse de dresser autour des questions de sexualité. On ne regrettera que le rôle secondaire réservé aux femmes dans ce récit, néanmoins, on rit assez pour pardonner.

Vous êtes encore là ? Mais enfin ? Vous devriez déjà être en train de découvrir les premières pages !


Pour une réforme radicale du code électoral.

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Bon. Je crois que tout le monde commence à s’apercevoir qu’en matière électorale, la majorité qui décide s’est transformée en une petite minorité qui décide. Entre une bonne moitié d’électeurs abstentionnistes et une intégralité de candidats complètement déconnectés de l’époque, on peut aisément se mettre d’accord sur un point : ça ne fonctionne pas. Une minorité élit une minorité encore plus petite et la majorité, quoique hétérogène, est au moins d’accord pour ne pas être d’accord avec ces minorités dirigeantes.

Aussi, il est grand temps de prendre une mesure efficace, la seule qui n’implique que les minorités qui nous impliquent : il faut revenir à la bonne vieille tradition du duel. Ainsi, en guise de primaires, tous les candidats « républicains » ou « socialistes » ou autres devront s’affronter deux par deux au pistolet à poudre noire, au sein de leur propre camps, jusqu’à ce que mort s’ensuive. Il ne pourra en rester qu’un dans chaque « famille » politique, puis les duels reprendront pour mettre face à face les candidats des différents courants.

La solution du duel a de multiples avantages : elle permettra de renouveler régulièrement le personnel politique, de n’avoir que des candidats courageux et réellement impliqués et garantira que le Président sera un homme ou une femme d’action. Certes, ça ne résoudra en rien le problème des minorités qui choisissent pour tout le monde. En tout cas, pas dans un premier temps, mais sur le long terme, allez savoir.


2084 de Boualem Sansal

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Arrêtez immédiatement ce que vous êtes en train de faire, il y a peu de chance que ça soit aussi prenant que la lecture de 2084.

Boualem Sansal, qui a maintes fois écrit sur les dangers de l’islam politique, condense ici les fruits de sa réflexion en un roman post-apocalyptique dans lequel les intégristes de l’Islam ont gagné. Ils ont gagné et se sont inspirés de l’Angsoc et de la novlangue d’Orwell pour créer leur fonctionnement politique et leur langue, car 2084 n’a rien du plagiat : il est construit dans la lignée de 1984.

La soumission de tout un peuple, immense, est forcément au cœur du propos. La barbarie n’a pas plus de limite que la culture de la délation et de l’ignorance. Aucune femme n’est évidemment visible dans l’espace public. La misère est immense, mais chacun s’y soumet volontiers en récitant quelques versets du nouveau livre sacré. La guerre est permanente, même si personne ne sait qui est l’ennemi, qui par ailleurs n’est pas censé exister puisque la religion nouvelle a soumis le reste du monde. Les dictatures composent fort bien avec leurs paradoxes.

Avec cette description de ce futur qui n’est pas à souhaiter, Boualem Sansal parle évidemment à ses contemporains. Il pointe le danger qu’il y a à sous-estimer la puissance destructrice des intégristes, mais aussi celui de ne pas se pencher au chevet d’une religion contemporaine bien réelle et bien malade.

Outre son contenu passionnant, 2084 est un roman terriblement bien écrit. Si j’accorde peu d’importance aux prix littéraires, force est de constater que celui délivré par l’Académie Française est au moins une garantie de belle langue.

Enfin, Boualem Sansal a fini de me convaincre, si besoin était, que la littérature politique, sociale, la littérature de combat en quelque sorte, se trouve de l’autre côté de la Méditerranée. La France se contente facilement de romans qui sont à la littérature ce que les téléfilms romantiques sont au cinéma, ou, pire, de cette littérature réactionnaire qui fait les choux gras de la presse. De Boualem Sansal à Kamel Daoud en passant par Rachid Boudjera, la littérature algérienne n’hésite pas à secouer les lecteurs, les idées reçues et le prêt-à-penser. Et pour ma part : j’en redemande à l’infini.


Professeur Singe de Mo Yan

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Professeur Singe suivi de Le bébé aux cheveux d’or, est, comme le titre l’indique une suite de deux nouvelles.

La première, Professeur Singe, donc, démarre très fort. Une suite de scènes totalement burlesques nous plonge dans un univers à mi-chemin entre le cartoon qui n’est pas sans rappeler Tex Avery et les mangas japonais, ce qui est un comble pour un auteur chinois. Néanmoins, sous ce vernis humoristique on sent poindre la mélancolie. Mo Yan nous parle ici de l’absurdité de la pression sociale, des conventions et de l’uniformité. Certes, il aborde ces thèmes sous l’angle de la société chinoise, mais l’ensemble est universel. Hélas, alors que la quatrième de couverture nous promet maints rebondissements, on arrive aux derniers mots de la nouvelle avec la sensation d’une conclusion bâclée. Professeur Singe donne l’impression d’un roman qui aurait été bouclé à la va-vite et publié avant d’avoir été réellement terminé. Les habitués des longs romans de cet auteur majeur seront déçus.

Heureusement arrive ensuite Le bébé aux cheveux d’or. S’il y a là aussi quelque chose de l’absurde, Mo Yan nous plonge dans les mœurs rurales, aborde avec finesse la question de l’enfant unique, du pouvoir des petits-chefs, de la vieillesse et de l’amour. Au détour du récit, on découvre quelques mythes chinois, mais aussi les habitudes des paysans chinois, les absurdités économiques de l’époque de Mao et leurs conséquences déplorables sur l’agriculture. Les personnages sont attachants même dans leur folie, la superstition trouve sa place dans un univers concret, et, là encore, le poids de la pression sociale se fait sentir. Le bébé aux cheveux d’or est une nouvelle triste, mélancolique mais si belle !

Même si la première nouvelle est décevante, on retrouvera néanmoins tout au long du recueil le style particulier de Mo Yan à qui personne ne pourrait reprocher le manque de talent d’écriture. Chaque phrase reste magnifiquement construite et ceux qui ne connaissent pas encore sa plume pourront entrer dans son univers plus aisément avec ces nouvelles qu’avec ses longs romans tels que Beaux Seins Belle fesses ou La dure loi du Karma, aussi géniaux qu’épais mais peut-être un peu plus difficiles à aborder pour le lecteur non-aguerri.


Ceci n’est pas un piratage

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Bombe, AK 47, Djihad, Daech, Syrie, chiens de mécréants, Abou Bakr al-Baghdadi, Allah, Coran, calife, fatwa, Mossoul, décapitation, immolation, Charlie Hebdo, Salman Rushdie, Irak, Yémen, salafistes, al-Nosra, charia, Abou Mohammad al-Joulani, attentat, Ansar Bait al-Maqdis, Boko Haram, explosion.

Tard dans la nuit de mercredi à jeudi, une Assemblée nationale clairsemée (seulement 30 députés présents) a adopté les fameuses boîtes noires qui doivent permettre par des algorithmes de détecter les comportements suspects sur Internet. Je procède simplement ici à un test d’efficacité.

Si je venais à disparaître, merci de venir me chercher en garde à vue.


Du bénéfice des « salles de shoot »

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1986. C’est l’année de l’ouverture de la première salle d’injection en Suisse. Or les suisses savent faire un truc auquel les français sont incapables de penser : quand ils mettent en place quelque chose, ils créent en même temps les moyens de l’évaluer. Des objectifs généraux et spécifiques sont fixés, des indicateurs sont définis pour évaluer s’ils sont atteints. Simple et efficace. C’est ainsi qu’on sait qu’aucune overdose mortelle n’a jamais été constatée dans ces salles. Si ces salles n’avaient eu aucun bénéfice, les suisses auraient été les premiers à les fermer. Or, entre 1986 et aujourd’hui, une quinzaine d’autres salles d’injection ont été ouvertes.
Il existe de telles salles en Espagne, au Canada, en Australie, en Allemagne, aux Pays-Bas, au Luxembourg, en Norvège, chaque pays ayant à son tour mis en place des moyens d’évaluation des bénéfices. Chacun de ces pays a conservé les salles d’injection et en a souvent ouvert d’autres par la suite.
A travers le monde, on a mesuré entre 0.5 et 7 urgences pour mille injections. S’il n’y a pas eu de décès, c’est que le personnel de ces salles est formé pour faire face à de telles urgences. Autrement formulé, il pourrait y avoir jusqu’à 7 morts pour 1000 injections sans les salles d’injection. En compilant les données internationales, on estime qu’entre 10 et 37% des usagers de ces salles accèdent à des soins en général, à des cures en particulier.
Partout, on a aussi mesuré une nette diminution du nombre d’injections dans l’espace public. Il a été montré dans tous les pays ayant des salles d’injection que les nouveaux consommateurs n’étaient pas plus nombreux. Il n’y a pas non plus d’augmentation du nombre de rechutes.
Enfin, aucune augmentation des délits n’a été mesurée, nulle part, à proximité des salles d’injection.
Toutes ces données – et bien d’autres encore – sont publiques et ont été compilées par l’Inserm.
Pourtant, en France, on va encore perdre du temps en faisant des expérimentations qui ont déjà été réalisées sérieusement à des dizaines d’endroits. Et malgré des évaluations positives partout où des salles d’injection ont été ouvertes, de vieux réactionnaires clientélistes continuent d’agiter des peurs irraisonnées contre ces lieux qui mènent aux soins.
Il serait peut-être bon de rappeler à tous les pourfendeurs d’évolution sociale que la toxicomanie n’arrive pas qu’aux enfants des autres.


La Fin du Monde de Camille Flammarion

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Je vous ai déjà parlé il y a peu de temps de Camille Flammarion, et de fait il est bon de connaître un peu son parcours personnel pour apprécier pleinement La Fin du Monde, l’un éclairant l’autre et inversement. Ce livre n’est pas exactement un roman. Du moins a-t-il peu d’intérêt en tant que tel, et pourtant, c’est une œuvre à découvrir.

S’il y a bien un vague schéma narratif, il n’est qu’un prétexte pour l’auteur qui souhaite surtout transmettre aux lecteurs de son époque autant de savoirs que possible en matière d’astronomie, de géologie et de climatologie. Mais Camille Flammarion n’était pas seulement un scientifique versé dans la vulgarisation, c’était aussi un penseur quelque peu idéaliste. Aussi se saisit-il ici de maints prétextes pour nous exposer ce qu’il espère être l’avenir. Et tout l’intérêt pour nous, lecteurs du XXIe siècle, se situe entre ces lignes-là. La science-fiction en dit souvent long sur l’époque à laquelle elle a été produite, et La Fin du Monde apparaît dès lors comme un document historique, un point de repère tant dans l’avancée des sciences que dans les aspirations sociétales.

Avec cette œuvre, on mesure le grand bond en avant des sciences en un peu plus d’un siècle : si les planètes sont encore à la même place, on sait maintenant exactement de quoi elles sont composées. On sait aussi que Mars n’est définitivement pas habitée, ni habitable, et on le sait d’autant mieux qu’on y a envoyé un robot : Flammarion n’a pas envisagé un instant qu’un jour les Humains iraient dans l’espace. La Fin du Monde est une fin géologique, celle qui ne manquera pas d’arriver d’ici quelques millions d’années, et pendant tout ce temps, si l’Humanité vue par Flammarion a vaincu la nature, jamais elle n’a songé à s’envoler pour d’autres cieux. Autres temps autres mœurs : la disparition des animaux sauvages et des forêts y sont présentées comme une immense victoire. Flammarion est du temps de la Révolution Industrielle : il n’y a guère de question éthique à se poser quant au progrès technique.

On retrouve au fil des pages un sujet auquel Camille Flammarion tenait beaucoup : l’égalité des droits pour les femme. Ses scientifiques du futur sont des deux sexes, les meilleurs sont des meilleures. Il y a maints ouvrages contemporains de science-fiction qui se soucient moins de présenter des personnages féminins d’importance. Un demi-siècle avant que ça ne soit effectif, il leur octroie le droit de vote. Par petite touche et à sa façon, il a instillé cette idée au même titre qu’il a œuvré pour la vulgarisation des sciences. Il est aussi à noter qu’il y fait d’un simple ouvrier un découvreur d’importance.

La Fin du Monde est un livre truffé de redondances, si bien que certains chapitres sont un peu pénibles à lire. Néanmoins, c’est une œuvre à découvrir pour maintes raisons qui ne sont pas forcément en lien direct avec la littérature. Je serais tentée de développer ici les différents thèmes abordés dans cet ouvrage, mais je m’en voudrais de vous gâcher le plaisir de la découverte.


Colères de François Rollin

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Dans ce spectacle, François Rollin tricote et détricote les colères d’un quidam névrosé, traumatisé quand il était enfant par le vol de son goûter par un éléphant du zoo de Vincennes, distribuant des baffes à un fonctionnaire de la Préfecture de Limoges et harcelant les automobilistes qui font un écart à gauche avant de tourner à droite, ce qui est insupportable et surtout criminogène, comme il nous le démontrera.

Colères n’est pas une succession de sketchs mais un spectacle d’un seul bloc, très écrit, alambiqué et rageur. Le personnage est pathétique, malheureux. Tout son propos est de nous démontrer qu’on ne peut pas rire de tout, ni de tous et surtout pas de ceux qui se sont fait voler leur goûter par un éléphant du zoo de Vincennes. Il nous le démontre d’ailleurs si bien qu’on en rit beaucoup.

On est loin de la tendance actuelle de l’humour (?) facile : François Rollin est un grand maître des mots et de la construction de textes ciselés. Et pour ne rien gâcher du plaisir, il donne de sa personne pour incarner son personnage.